Réunis ce mardi 2 décembre au Musée des Civilisations Noires de Dakar, les ministres de la Culture du Liberia, du Ghana, de la Guinée-Bissau, de la Gambie et du Sénégal ont partagé leurs expériences pour renforcer les industries culturelles et créatives (ICC). Au cœur des échanges : comment mieux valoriser les réalisations nationales, bâtir des chaînes de valeur locales, et faire de la culture un levier économique majeur pour l’Afrique.
Une nouvelle génération de leaders culturels en Afrique
Le séminaire ministériel a mis en lumière l’émergence d’une nouvelle génération de dirigeants africains convaincus que la culture est un outil de transformation sociale et économique. Ces leaders veulent « nettoyer le fil », c’est-à-dire ouvrir de nouvelles voies, rompre avec les schémas anciens, et placer la culture au cœur des politiques publiques, même dans les plus petites économies.
Selon eux, valoriser nos identités passe par la mise en avant de nos ressources naturelles, de notre histoire, de nos traditions vestimentaires, culinaires et artistiques. Pour les ministres présents, il s’agit de redonner à la culture sa place légitime dans la construction des nations africaines.
Mettre en place de véritables chaînes de valeur culturelles
Les échanges ont souligné la nécessité urgente de créer des chaînes de valeur complètes dans les secteurs de la mode, de l’artisanat, de la musique, du cinéma, du design et des arts numériques.
Le constat est partagé :
l’Afrique regorge de créateurs talentueux,
mais trop peu de systèmes structurés permettent d’industrialiser la production,
ou de soutenir de manière durable les entrepreneurs culturels.
Les ministres ont insisté sur le rôle des États pour :
réviser les cadres fiscaux,
mettre en place des mécanismes de soutien à la création,
favoriser la professionnalisation du secteur,
encourager le secteur privé à investir davantage.
Affirmer nos identités par la consommation locale
Un point fort du séminaire a été l’appel à consommer africain : tenues traditionnelles, artisanat, objets de décoration, produits issus des terroirs, créations artistiques.
Selon plusieurs intervenants, tant que les Africains ne valorisent pas leurs propres produits, il sera difficile d’imposer nos cultures sur la scène mondiale.
« La culture passe aussi par l’assiette, par le textile, par ce que nous mettons dans nos maisons. Si nous ne valorisons pas nos céréales, nos tissus, nos matières premières, d’autres le feront à notre place », a rappelé un des ministres.
Des expériences croisées enrichissantes
Les interventions successives de la ministre libérienne de la Culture, de la ministre ghanéenne, de la ministre bissau-guinéenne et du ministre gambien ont mis en avant :
les initiatives nationales pour soutenir les créateurs ;
les difficultés communes d’accès aux financements ;
la nécessité de former des jeunes à des métiers techniques (stylisme, design, couture, numérique, audiovisuel) ;
l’importance d’une coopération inter-pays pour créer des plateformes régionales de promotion.
Tous ont insisté sur la nécessité de rendre visibles les talents africains, au niveau local comme international.
Le Sénégal réaffirme sa vision : la culture au centre des politiques publiques
Clôturant les échanges, le ministre sénégalais du Tourisme et de la Culture, M. Amadou Ba, a rappelé la vision du nouveau gouvernement : faire de la culture un pilier stratégique de développement.
Il a insisté sur :
la révision des politiques culturelles,
la mise en place d’un environnement fiscal adapté aux industries créatives,
la promotion internationale des créateurs locaux,
l’appui aux petites et moyennes entreprises culturelles,
la nécessité d’un système solide capable d’industrialiser la mode, le design et les arts.
Selon lui, « les créateurs sénégalais ne doivent pas se contenter d’exister : ils doivent conquérir le monde ».
Ce séminaire ministériel a permis de jeter les bases d’une coopération culturelle renforcée en Afrique de l’Ouest. Les ministres ont appelé à bâtir des écosystèmes solides, capables de transformer la créativité africaine en richesse économique durable.
Une ambition qui s’inscrit dans la volonté d’une Afrique fière, innovante, et consciente de la valeur inestimable de son patrimoine culturel.
Assane Diop